lundi 25 janvier 2010

EN ROUTE VERS LE SUD





Après la réparation du support d’amortisseur de Guy à ANTOFAGASTA, nous posons, ou plutôt nous ensablons, nos véhicules sur une plage pour y passer la nuit ; c’est fou ce que l’on dort bien, bercés par le bruit des vagues, à 0 mètres d’altitude, 20° la nuit et sans bestioles qui grattent ! Point de bain du matin pour cause de méduses mais pas mal de sport quand même pour libérer nos engins ; les plaques de désensablage remplissent leur mission, on jardine, on creuse et on se plante mais on s’en sort honorablement malgré la tente des Bonvin qui refuse de se refermer (elle est un peu rebelle, la dernière fois elle ne voulait pas s’ouvrir !) Ca fait un peu désordre.





Il ne faut pas que vous pensiez que nous sommes en grandes vacances avec les doigts de pied en éventail…plein de soucis, de stress, de complications diverses surviennent tous les jours, notre route est parsemée d’embuches et notre voyage n’a rien à voir avec ceux de Kuoni : nos moyens de transport donnent souvent des signes de faiblesse et il faut y être attentifs si nous voulons aller jusqu’au bout : Odeurs de brulé, voyants qui s’allument, pneus qui crèvent, supports d’amortisseurs qui cassent, batteries à plat au moment de quitter le bivouac, tente de toit récalcitrante, châssis qui ploie (mais ne rompt plus), frigo qui disjoncte au moment le plus chaud avec du poisson à l’intérieur, cosse de batterie qui lâche, les C.B qui ne fonctionnent que lorsqu’elles en ont envie (le micro de Jean Mi n’a marché qu’une dizaine de jours), ensablements, embourbements, égarements… sans parler des voyageurs eux même avec leurs courantes chroniques, maux de tête et d’oreilles « altitudinaux », sommeils perturbés, décisions à prendre sans cesse, penser au plein d’eau, de gasoil, trouver du pain ou une épicerie au milieu du désert, prévoir les itinéraires et se mettre d’accord, compulser les cartes et lire les guides, deviner l’état de la piste que l’on va suivre sur 300 kms ce qui peut prendre 4 ou 12 heures, manipuler les G.P.S. à bon escient, demander son chemin en « chilien » approximatif, trouver des laveries pour le linge et des bivouacs magnifiques, calmes et tranquilles…même en pleine ville….et réparer au fur et à mesure tout ce qui casse ou risque de casser. Mais non, nous ne sommes pas maso ; c’est nouveau tous les jours, les climats, les paysages, les rencontres, le ciel et la mer, les oiseaux et les couchés de soleil sur les lagunes ou les volcans. On est surpris, ravis, déçus ou emballés et on ne peut pas s’ennuyer… ( sauf tout de suite où nous suivons une ligne droite qui traverse le désert sur 400 kms et qu’on aimerait bien changer de diapo… mais on peut toujours lire ou écrire.) Ce qui est beau quand même dans ce désert, c’est la couleur du minerai qui teinte les montagnes et qui les font varier selon l’éclairage du rouge lie de vin au doré ou à l’orangé lumineux.



Pour aller à TALTAL nous avons deux choix : traverser le désert d’ATACAMA, aride et d’une désolation totale, ou rejoindre la mer et longer la côte, aride et d’une désolation totale également sauf que les vagues qui explosent sur les rochers y mettent un peu de vie. La piste y est pourrie ainsi que le brouillard glauque qui stagne sur les premiers reliefs (encore la faute à Humbolt), eau froide + air chaud = condensation. Ici, on appelle cette brume très fréquente le « Camanchaca ». Au creux des rochers se blottissent çà et là des campements de ramasseurs d’algues qui sèchent un peu partout sur les plages, peignées comme de longues chevelures. On s’arrête après 4 heures de tape cul et de tôle ondulée au bord de l’eau. Un « ramasseur » vient nous faire un bout de conversation, son activité est lucrative, il ne s’en plaint pas, les algues séchées sont envoyées en Chine pour fabriquer des cosmétiques. Il nous rassure sur l’écume jaune qui s’étire en longs rubans au fond des golfs clairs, ce n’est pas de la « contaminacion » seulement le brassage des fonds…en tous cas, tout ça n’est pas très net !



Grosse journée de liaison désertique entre TALTAL et La SERENA, quelques cactus commencent à pointer leur nez et peu à peu une végétation méditerranéenne sèche s’installe. Vue magnifique pour notre bivouac au dessus de l’océan dans les buissons desséchés et rabougris. La plage de la Serena pourrait ressembler à celle de Golf Juan, si ce n’est la température de l’eau. Nous prenons la Panaméricaine pour avancer un peu. Arrêt pique nique et bain (pour J.M) sur une vraie plage avec des baigneurs (3 ou 4) et longue étape le long de la côte. De belles baies, un peu urbanisées et quelques complexes touristiques plus « pimpants », enfin des notes de verdure : le désert d’Atacama tire à sa fin. Nous passons par ZAPALLAR, la station la plus « chic » du Chili ; elle a un côté Bretagne nord et de belles propriétés dans les bois d’ifs surplombant la mer, ça nous change des cabanes et des baraquements minables qui squattent les fronts de mer.



Le campement de ce vendredi soir est particulier : face à la plage, seuls des rails nous séparent de celle-ci. Et sur ces rails passeront trois trains transportant des fus et du cuivre. Très lentement, la trentaine de wagons s’étire derrière la loco au ras de nos tente, un le soir, un pendant la nuit et un pour le petit déj. Balade le long des gros rouleaux au coucher du soleil et ses milliers d’oiseaux et petit matin glauque et gris comme d’habitude…



Samedi 16 Janvier : A nous VALPARAISO ; c’est génial Valpa, et surprenant aussi ; ses maisons recouvertes de tôles peintes de toutes les couleurs, ses collines, urbanisées de brique et de broque, qui dominent le port, les funiculaires qui desservent chacune d’elles et la charmante maison de Pablo NERUDA qui ressemble à un bateau. Nous déjeunons de fruits de mer au marché central (des trucs qu’on n’a jamais vu nulle part et pas forcément délicieux) et déambulons dans les ruelles pentues. C’est juste un peu dommage que la brume ne se lève qu’à 14 heures !



SANTIAGO n’est qu’à une heure et demi de Valparaiso et nous y passerons deux nuits à l’hôtel de Paris. Demain ce sont les élections présidentielles au Chili, nous avons le choix entre Piniera, candidat de droite et Frei, socialiste dans la lignée de Michelle Bachelet qui ne peut plus se représenter. C’est l’état de guerre à Santiago, tout est fermé, les musées, les parcs, les cinémas même les restaus et la vente d’alcool est interdite. On déambule toute la journée dans cette ville morte et soudain, vers 18 heures, c’est l’explosion de Klaxons, de drapeaux, la ville est en liesse (ou du moins 52%) pour célébrer l’avènement de leur nouveau président qui sera le chef du premier gouvernement de droite depuis l’ère Pinochet. Pour nous ce sont, après l’Uruguay et la Bolivie, les troisièmes élections présidentielles que nous vivons en Amérique Latine depuis notre départ. Les Vassault traversent la ville tonitruante pour rendre visite aux « cousins chiliens », adorables et chaleureux, et gouter leur vin, tandis que les Lamar et Bonvin dégustent une salade au milieu de la fête.



Lundi, tout le monde au boulot, Santiago reprend son visage normal, finie la fiesta. Quant à nous, nous devons descendre vers le sud pour une dernière longue étape (après ce seront les vacances…) On s’arrête quand même pour déguster quelques vins chiliens puisque nous traversons les plus fameux vignobles, ça s’impose et il serait mal élevé de ne pas le faire !

Mardi matin, nouveau coup dur pour le toy des Bonvin, panne totale de batteries et le système des câbles branchés sur les deux autres voitures, déjà souvent utilisé, ne peut rétablir cette fois le courant. Le problème est que nous sommes au fin fond d’une clairière en pleine nature au bout d’une piste. Nous déballons nos sangles toutes neuves et c’est le remorquage sur 10 km de piste, sans freins sans direction et sans appels de phares pour communiquer. Sur le goudron, nous rencontrons un chilien adorable (mais c’est un pléonasme) qui nous débrouille un plan dépanneuse jusqu’au prochain garage Toyota. Un peu légère la dépanneuse et ce sont ses propres roues avant qui ont décollé lorsqu’il a fallu soulever la voiture… finalement, en remorque avec une barre rigide fera très bien l’affaire.


Après délestage du portefeuille de Guy et l’embarquement de deux batteries neuves, on taille la route sur 150 km pour camper à l’orée de l’ARAUCANIE, vaste région de lacs et de volcans en avant poste du grand sud. Pour dormir, ça devient un peu plus compliqué car tout est clôturé, nous demandons un coin de champ fleuri aux propriétaires des lieux qui nous rendront une petite visite amicale au campement le soir et nous apporteront une grande casserole de lait pour le petit déjeuner. Ils son vraiment très sympas ces chiliens, affables, prêts à rendre service, ils vont au devant de vous, posent plein de questions, sont curieux de savoir si leur pays nous plait peuvent perdre une heure pour vous dépanner ou pour vous expliquer le meilleur itinéraire et les plus beaux endroits, par contre leur espagnol est plus difficile à comprendre et plus rapide qu’ailleurs et pour les nuls c’est une catastrophe !



Volcans enneigés, parfaitement coniques, qui se reflètent sur des lacs étincelants. Torrents impétueux, pêcheurs à la mouche dans les rivières turquoise coulant sous les frondaisons, dignes de celle de Robert (Redford), cascades cachées dans la verdure, étangs tapis dans les bois, sources chaudes dans lesquelles on se prélasse, et eau transparente, à peine fraîche pour se baigner. C’est une région magnifique même si elle est moins dépaysante que ce que l’on a vu jusqu’ici, ça ressemble assez à nos alpages mais il faut y ajouter les volcans immaculés qui fument, les eaux thermales, fumantes aussi, et des forêts d’araucarias très exotiques. Nous roulons de lacs en rivières, marchons dans les forêts de hêtres et d’araucarias parmi les fuchsias et les lupins, nageons dans les eaux cristallines. Le temps est magnifique et la végétation de plus en plus somptueuse en avançant vers le sud ; véritable forêt vierge aux arbres immenses qui dégringolent des berges abruptes jusqu’aux lacs. Il fait 6° la nuit et 30° dans la journée sans un nuage.


Par les pistes forestières ou en empruntant le ferry, nous passons en Argentine pour rejoindre BARILOCHE. Mais, petite ombre à ce tableau idyllique ; la commande d’embrayage de Jean Mi qui rend l’âme …juste 100 km sans changer de vitesse et un petit contre temps.



Les Indiens MAPUCHE qui vivaient dans la région des lacs à l’arrivée des Espagnols ont su leur résister trois siècles. Au XIX ème une importante colonie Allemande et Suisse s’est installée en apportant leurs traditions et leur culture, les villes sont très germaniques les chalets suisses et même le chocolat !